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Nous n’apprenons qu’en répétant

Nous n’apprenons qu’en répétant

L’un des aspects les plus manifestes mais aussi les plus frappants de l’éducation moderne est que vous ne la parcourez qu’une seule fois. Vous vous présentez tous les jours pendant un certain nombre d’années, vous vous remplissez de connaissances, puis, à l’âge de vingt et un ans environ, vous vous arrêtez – et vous commencez le reste de votre vie.

Avant l’essor de l’éducation moderne, le système éducatif le plus puissant du monde était lié aux religions.  Ce sont les religions qui nous ont enseigné l’éthique, le but et le sens de la vie. Et l’un des aspects intéressants de leur pédagogie était qu’elles étaient obsédées par la répétition. Pour elles, il était absurde d’imaginer pouvoir apprendre quoi que ce soit en ne le faisant qu’une seule fois. Le fondement même de l’éducation religieuse reposait sur la répétition. En tant que musulman, on récitait cinq fois par jour les principes fondamentaux de l’islam ; en tant que moine bénédictin, on revoyait sept fois par jour les leçons des Saintes Écritures. En tant que juif orthodoxe, 300 jours par an étaient consacrés à la commémoration et à la répétition rituelle des idées de la Torah, tandis qu’en tant que prêtre zen, on était initié à s’asseoir les jambes croisées et à méditer jusqu’à douze fois entre le lever et le coucher du soleil.

Les religions proposaient une vision de l’esprit qui pourrait rappeler la passoire : tout ce que l’on y verse se perd rapidement dans nos mémoires percées. À l’inverse, l’éducation moderne adhère à une théorie de l’esprit qui s’apparente implicitement à celle du seau : on y déverse le contenu et, sauf accident, il y demeurera à peu près toute la vie. C’est pourquoi nous n’hésitons pas à déclarer un livre favori et à ne le lire finalement qu’une seule fois.

Les religions proposaient une vision de l’esprit qui pourrait rappeler la passoire : tout ce que l’on y verse se perd rapidement dans nos mémoires percées. À l’inverse, l’éducation moderne adhère à une théorie de l’esprit qui s’apparente implicitement à celle du seau : on y déverse le contenu et, sauf accident, il y demeurera à peu près toute la vie. C’est pourquoi nous n’hésitons pas à déclarer un livre favori et à ne le lire finalement qu’une seule fois.

Beaucoup moins naïvement et beaucoup plus généreusement, les religions préfèrent imaginer que tout ce que vous dites à quelqu’un le matin sera, à deux heures de l’après-midi, en voie d’évaporation et aura pratiquement disparu à la tombée de la nuit. La répétition est le seul moyen de s’assurer que quelque chose reste. Lorsque vous avez terminé la lecture d’un texte sacré favori, l’histoire de Moïse par exemple, vous retournez directement au début et recommencez, aux roseaux et au nourrisson.

Nous payons un lourd tribut au manque de considération pour la répétition des leçons et des idées. Il y a toutes sortes de choses que nous devrions absolument garder à l’esprit : les aspects positifs de notre nature qui nous disent d’être patients, de rester doux, de nous efforcer de pardonner, de nous arrêter pour apprécier, de nous efforcer de comprendre ce qui semble au premier abord si éloigné et invivable…

Ces choses nous ont été enseignées une fois, bien sûr. Mais cela remonte à loin maintenant. Probablement quand nous avions sept ans. Et donc, naturellement, elles ne sont pas au premier plan de nos esprits lorsque nous faisons carrière au cours de nos vies, heurtant tout et tout le monde, enrageant et blâmant, calomniant et haïssant.

Il y a une sagesse semblable, et peut-être même bien plus grande, à trouver dans la sphère profane plutôt que religieuse, mais ceux qui la dispensent sont bien trop confiants quant au fonctionnement de nos esprits. Ils choisissent de nous parler une seule fois, peut-être à voix basse, de toutes les choses qui comptent, peut-être à travers un poème magnifique mais trop fourni ou d’un roman lent et émouvant que nous avons lu sporadiquement au cours d’un été il y a vingt ans. Et ensuite, ils s’attendent à ce que nous gardions cela à l’esprit toute notre vie durant – et nous sommes surpris de voir que la folie humaine se poursuit sans relâche.

Nous ne devons pas abandonner nos connaissances les plus précieuses aux gardiens indolents de nos mémoires. Nous devons dérober aux religions le principe de répétition et créer nos propres catéchismes, nos propres prières de minuit, nos propres cycles de connaissances répétées. Nous devons faire en sorte que les idées les plus importantes soient constamment présentes dans notre esprit. Nous ne devrions jamais en avoir fini avec l’école. Nous devrions nous replonger quotidiennement dans les grandes vérités : celles de la mort, de la compréhension de soi, de l’amour, de la tristesse et non de la méchanceté des autres…

Beaucoup d’entre nous en ont fini avec la religion ; mais nous ne devrions pas en avoir fini avec ce que les religions savaient si bien tirer de nos esprits : que rien ne reste en éveil en nous, à moins que nous ne répétions et répétions à chaque nouvelle aube.

Nous devons revenir sans cesse –

Et notamment : 

Ici.

By The School of Life

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